lundi 6 juin 2011

Elle a dit que les jolis noms sont toujours tristes...

Ce soir, au théâtre de La Criée - en coproduction avec le Musée du Louvre - Patrice Chéreau met en scène Rêve d'automne de Jon Fosse...


" Pour que la vie continue
pour que les maisons et les rues et les villes
s'emplissent
pour que les gens meurent
dans la peur et la douleur et le désespoir
pour que les gens
se serrent les uns contre les autres
dans le désir et la douleur et la peur
et que d'autres enfants
qui disent que
les jolis noms sont toujours tristes
puissent naître
dans la peur et la douleur et le désespoir
Et au dessus de tout ça
il y aurait donc
ce que nous appelons
l'amour
si insupportablement incompréhensible
si impossible à définir
mais il existe
nous le sentons bien
C'est bien dans l'amour
que nous sommes

tout seuls
et ensemble
Nous le savons tous les deux
Nous le savons
Peut-être est-ce l'amour
qui sauve
les morts
peut-être"


Une histoire d'amour et de mort donc - mais y a-t-il d'autres histoires ?

Dans un cimetière - un musée dans l'adaptation de Patrice Chéreau - car "Les musées sont des maisons qui abritent des pensées" dit Proust...
Un homme et une femme se retrouvent - mais se sont-ils jamais quittés ? - peinent à se dire un amour qui existe mais qui ne se comprend pas et se nomme si mal...
L'homme enterre ses morts: sa grand-mère puis son père puis son fils puis lui-même vient à mourir...
Seules les femmes restent : la mère, l'épouse quittée, la maîtresse...

Une mise en scène sobre et délicate, comme un tableau où se mêlent les vivants et les morts - ceux qui sont déjà morts et ceux qui vont mourir, ceux qui s'aimaient et ceux qui ne s'aiment plus, ceux qui ont peur de rester seuls et d'être abandonnés - dans des ellipses temporelles qui se dévoilent peu à peu quand la vie les traverse...

Pascal Greggory, Valeria Bruni Tedeschi, Bulle Ogier, Bernard Verley, Marie Bunuel, Michelle Marquais et Alexandre Styker sont les acteurs de ce drame de Jon Fosse dont le texte aux répétitions entêtantes (Durassiennes ?) comme une lamentation, essaie de capter l'essence de nos terreurs et de nos désirs...

Magnifique...

2 commentaires:

  1. J'aurais tant voulu la voir cette pièce et laisser couler quelques larmes.
    Un ami m'en a fait l'éloge, la semaine dernière.
    Il m'a dit vouloir tout acheter de Jon Fosse...
    J'ai moi aussi très envie !

    Bel article, merci

    Et ce folio, juste à ma gauche, où quelques oiseaux de mer survolent le ciel me fait de l'oeil...Il est bien ?

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  2. La pièce était très belle, c'est vrai...je n'ai pas pu résister à acheter le recueil contenant le texte en sortant...je ne peux que t'encourager à te lancer toi aussi !

    Quant au livre de Jon Kalman Stefansson, je dirais qu'il est aussi beau et rude que l'Islande doit l'être... L'auteur y raconte la dureté de la vie des pêcheurs de morue, la cruauté de la mer lorsqu'elle prend une vie mais il y fait entrer beaucoup d'humanité et de poésie par le biais de ses jeunes héros...très puissant je trouve...
    Je te le conseille aussi !

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