dimanche 11 mars 2012
J'écoute pour ne pas ignorer... je lis pour ne pas oublier...
Voilà, aujourd’hui - 11 mars 2012 - la journée était empreinte de ce triste anniversaire de la catastrophe de Fukushima... un an déjà...
Ces derniers temps, j'ai l'impression que l'ampleur de ce drame commence à peine à affleurer ma conscience - comme si je n'avais pas voulu ou pas pu approcher la véritable dimension de l'ensemble des faits : le tremblement de terre, le tsunami, la catastrophe nucléaire et toutes leurs conséquences...19 000 victimes et disparus...
Depuis plusieurs jours, j'écoute avec davantage d'attention, je cherche à m'informer de façon plus active et je re-découvre, grâce aux publications paraissant à cette occasion, l'importance de nos réactions individuelles pour la reconnaissance et la mise en perspective de cette tragédie...
Un premier livre reçu cette semaine - un début de lecture en exergue aux nombreuses qui vont suivre je pense - le "Journal des jours tremblants" de Yoko Tawada paru aux éditions Verdier...
Cette romancière japonaise, née à Tokyo en 1960, vit en Allemagne depuis 1982 et écrit désormais en allemand. Pour retranscrire ses réactions et réflexions durant les premiers jours ayant suivi la catastrophe, elle retourne à sa langue maternelle et ses lignes constituent une première réponse à l'injonction d'"écrire après Fukushima".
Une mention particulière pour le Télérama du 10 mars et son dossier "Un an après Fukushima, les écrivains japonais brisent le silence" où la journaliste Marine Landrot relate ses rencontres avec des écrivains japonais qui manifestent et essaient de lever la chape de silence que les autorités japonaises imposent sur la catastrophe nucléaire de Fukushima.
Aini s'expriment : Kenzaburô Oé (prix Nobel de littérature), Akira Mizubayashi, Keijiro Suga, Hiromi Kawakami, Genyû Sôkyû (poète et moine boudhiste installé à 45km de Fukushima) et Hideo Furukawa (écrivain montant de la nouvelle génération, né à Fukushima) - ils soulignent l'importance de leur parole et la naissance inévitable d'une nouvelle littérature après le drame.
Deux autre ouvrages ont attiré mon attention : "Fukushima : Récit d'un désastre" (collection L'infini chez Gallimard) de Michaël Ferrier écrivain français installé à Tokyo depuis de nombreuses années (auteur du très beau "Tokyo, Petits portraits de l'aube") ainsi que l'ouvrage collectif "L'archipel des séismes" publié aux éditions Picquier.
Le premier est le récit d'un parcours allant du jour de la catastrophe, à "l'exil" temporaire de l'écrivain à Kyoto avant de prendre la route avec sa compagne pour Fukushima afin de venir en aide aux sinistrés... Il se double d'une réflexion personnelle sur le sens que l'on peut donner à ce drame et d'une dénonciation du mensonge des autorités : " On peut très bien vivre dans des zones contaminées : c'est ce que nous assurent les partisans du nucléaire. Pas tout à fait comme avant, certes. Mais quand même. La demi-vie. Une certaine fraction des élites dirigeantes - avec la complicité ou l'indifférence des autres - est en train d'imposer, de manière si évidente qu'elle en devient aveuglante, une entreprise de domestication comme on en a rarement vu depuis l'avènement de l'humanité. "
Le deuxième, dirigé par Corinne Quentin et Cecile Sakai est un recueil de textes de romanciers, poètes, essayistes et artistes japonais livrant leur témoignage autour du 11 mars 2011.
D'autres ouvrages paraissent à cette occasion, des ouvrages collectifs comme le numéro spécial de La Nouvelle Revue Française dirigé par Philippe Forest ainsi qu'un manga "Japon 1 an après" publié par les éditions Kazé et dont le bénéfice des ventes servira à aider le Japon...
Ces livres seront au premier plan du salon du livre de Paris ( 16 au 19 mars) dont le Japon est l'invité d'honneur et où de nombreux auteurs japonais sont conviés... J'y serai et j'espère avoir beaucoup à raconter en rentrant !
Pour finir, quelques liens d'émissions radio que j'écoute et ré-écoute en ce moment :
Les enfants de Fukushima, diffusé dimanche dernier sur France inter offre une approche éclairante sur la vie des enfants vivant à proximité de la centrale et sur les craintes de leurs parents concernant leur avenir. Philippe Nibelle, professeur de français marié à une japonaise, auteur de "Journal d'apocalypse" (Le Rocher éditions) est un médiateur de choix pour ce reportage au plus près de la vie quotidienne des rescapés.
Une approche plus scientifique apportée par une autre émission de France Inter "La tête au carrée" du jeudi 8 mars, à écouter là.
Enfin, une approche littéraire grâce aux archives de l'émission Hors-Champs de Laure Adler sur France Culture. En décembre dernier elle a réalisé cinq entretiens regroupés sous la thématique "Japon : comment penser l'avenir ?" avec des intellectuels et des artistes - Michaël ferrier et Satoshi Ukai, Naoya Hatakeyama (photographe), Wago (poète), Naomi Kawase (réalisatrice) et Ryoko Sekiguchi (écrivain) lui livrent leur témoignage et leurs réflexions...
Parce que m'informer est ma façon d'avoir une prise sur une catastrophe qui nous dépasse, parce que comprendre les faits et ne pas croire les mensonges est la moindre des justices envers une population qui souffre, parce que l'ignorance et le silence sont le pire des mépris, je vais continuer à lire et à écouter... parce que je ne supporte pas de ne rien avoir à répondre lorsqu'on me demande : "alors, toi qui aime le Japon, Fukushima, tu en penses quoi ?"...
(image Kibô-Promesse)
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Je suis toujours les tweets de Karyn Poupée depuis Tokyo où l'information est brute et concise.
RépondreSupprimerEt bien sûr toutes ces unes, ces émissions sur FI qui sont d'un grand intérêt. Mais, c'est une commémoration comme tant d'autres ; on en parle le jour anniversaire, puis, c'est à nouveau l'omerta. Il faut dire que le nucléaire, en ces temps de tambouille électorale, n'est pas le sujet de préoccupation des débatteurs publics !
Bien sûr Domi, tu as raison, il y a toujours cet effet "anniversaire" (encore que je n'ai pas trouvé les médias très bavards hier à ce sujet) qui fait qu'on en parle le jour J puis la situation retombe dans l'oubli...
SupprimerMais pour ma part je crois que le symbole de l'anniversaire reste important comme une piqûre de rappel - et il était impensable pour moi de ne pas en parler sur mon blog ce jour précis.
Je trouve beaucoup plus choquant le silence total de certains magazines d'information que la consensualité des autres qui en parlent avant d'oublier à nouveau... peut-être...
Et puis comme tu le dis : nucléaire = terrain glissant par les temps qui courent...
Bises.
Beaucoup de "blablabla"sur cette catastrophe qui est en premier ,dûe à un tremblement de terre ,puis à un tsunami,ce qui à fait le maximum de victimes.La conséquence en a était l'accident nucléaire.....qui pour l'instant n'a pas fait de victimes (bien sûr à venir et dans quelle proportion? ).Il faut remettre les choses en place!!Conclusion:le nucléaire fait moins de victimes que les catastrophes naturelles ou les accidents de voiture,ou les guerres!!Le nucléaire en France particulièrement est très sécurisé ,ultra perfectionné, très encadré ,très contrôlé,avec en plus la sécurité de la sécurité,et n'a rien à voir avec le nucléaire du Japon! J'ai à la maison quelqu'un qui a travaillé toute sa vie dans ce bain et qui m'explique tous les jours ,et peste contre tous les gents la plupart non scientifiques,qui disent des bêtises sans savoir de quoi ils parlent,pour faire peur parcequ'ils ont peur eux-même!....à méditer.Bises.Maryse
RépondreSupprimerNucléaire, terrain glissant donc...
SupprimerIl va de soi que je ne partage pas du tout ton opinion et que tes propos me choquent.
Certes, les morts et disparus sont les victimes du tremblement de terre et du tsunami et pas (encore) du nucléaire - mais quel avenir pour tous ceux habitants à proximité, pour tous ceux déjà contaminés et les autres à venir - quel avenir pour une région agricole dévastée dont plus personne ne veut consommer la production - et pourtant les locaux le font pour certains produits mais dans la peur et avec quelles conséquences ?
La sécurité du nucléaire est plus que relative malgré toutes nos précautions et mesures de sécurité, même en France.
La nature décide et j'ai toujours pensé qu'en utilisant le nucléaire, l'homme jouait à un jeu dont il ne maîtrise pas les règles... bien triste jeu en l'occurrence.